Fête des Mères
Plus ancienne qu'on ne le croit ?
Fête des Mères, fiche technique (France) :
- date : 30 mai (date mobile)
- type de fête : civile
- fériée ? non, mais toujours un dimanche
- fêtée depuis : le début XXe siècle sous sa forme actuelle
- célébrée : dans le monde entier
Un événement mondial, de nombreuses dates
Si la fête des Mères semble exister dans presque tous les pays du monde, il n'y a cependant aucune date qui fasse l'unanimité. De nombreux pays ont opté pour le 2e dimanche de mai, à l'instar des Etats-Unis, où la version moderne de cette fête est apparue.
Cependant, la fête prend une autre dimension dans certains pays, où elle peut être assimilée à la journée des femmes, à un événement national… ou à un choix beaucoup plus personnel, comme la date d'anniversaire de la mère du chef d'état en place !
En France, elle a lieu le dernier dimanche de mai, sauf quand celui-ci coïncide avec la Pentecôte. Auquel cas, la fête des Mères est décalée au premier dimanche de juin.
La Norvège est la première à la célébrer dans l'année, à la mi-février. L'Indonésie ferme le bal, avec une fête des Mères le 22 décembre.
Les origines
Dans le monde occidental, il est difficile de ne pas faire un rapprochement entre l'actuel fête des mères et les fêtes antiques grecques et romaines, dédiées à la figure maternelle.
Les Grecs avaient déjà une célébration pour rendre hommage à Rhéa, mère de Zeus et de nombreux autres dieux. Elle fut associée avec le temps à d'autres divinités, comme Déméter – déesse de l'agriculture et des moissons – ou Cybèle – déesse de la nature sauvage, faisant dès lors un rapprochement entre la fertilité des femmes et de la terre.
Un concept repris par les Romains lors des Matronalia chaque 1er mars, célébration qui marquait le premier jour du printemps (et de l'année, voir Jour de l'an), le renouveau de la nature, et célébraient évidemment les mères de famille !
Les Matronalia étaient aussi une référence à la fondation de Rome, puisque l'année devait démarrer à la date d'anniversaire de la ville. Or pour peupler cette cité naissante, les Romains se trouvaient en manque de femmes…
Ils ont alors tenté une alliance avec les Sabins de la région alentour, qui ont refusé toute alliance matrimoniale, de peur d'être bientôt surpassés par la nouvelle cité.
Sur le conseil du dieu Mars, Romulus monte alors un plan pour enlever les Sabines et les amener à Rome ! Mais une fois sur place, on ne les garde pas captives : Romulus les libère et les supplie d'accepter les Romains comme maris, en leur promettant le traitement dû à une épouse. Elles acceptent et deviennent finalement Romaines.
De leur côté, les Sabins refusent de ne pas venger l'affront et tentent plusieurs assauts contre Rome, mais enchaînent les défaites. Une ultime bataille voit s'opposer Sabins et Romains, au cours de laquelle les femmes décident de s'interposer et de brandir leurs nouveaux nés pour éviter la guerre qui oppose leurs frères à leurs maris.
C'est en souvenir du courage des Sabines et du pouvoir d'aimer de toutes les mères que les Matronalia rendaient hommage aux « matrones ».
Enfin, le 1er mars était aussi l'anniversaire de la consécration du temple de Junon, protectrice des jeunes épouses. Les femmes recevaient en cette occasion des cadeaux et de l'argent de leurs maris, puis elles se rendaient au temple de Junon, la tête couronnée de fleurs et en offraient à la déesse.
Moyen-âge et renaissance
Les Matronalia ont été célébrées jusqu'à l'Antiquité tardive, mais le christianisme semble avoir balayé l'idée d'une véritable journée dédiée à la mère.
La fête a peut-être persisté quelques temps sous d'autres formes, mais la religion ayant très vite établi la virginité de Marie, la figure maternelle s'est trouvée détachée de toute idée de fertilité et de procréation naturelle.
Cependant, l'idée a dû survivre sous une forme ou une autre en Irlande et en Angleterre, où l'on trouve des traces du Mothering Sunday à la Renaissance, et possiblement au Moyen-âge, bien que les sources manquent.
Le Mothering Sunday était l'occasion d'aller à l'église mère la plus proche de chez soi lors du 4e dimanche de Carême, pour une messe honorant Marie et les mères de famille. On disait alors qu'on était allé ''mothering''.
Avec le temps, ce dimanche devint même l'occasion pour les domestiques de prendre quelques jours de congé, afin de rentrer voir leur famille et de se rendre à leur propre ''église mère''.
Les Britanniques ont d'ailleurs gardé cette date pour la fête des mères moderne.
Repeupler la France
Si la France peut se targuer d'avoir réussi à célébrer une première fête des Mères deux ans avant les Etats-Unis, l'histoire rattachée à cette fête est toutefois assez différente.
En 1906, Prosper Roche, fondateur de l'Union Fraternelle des Pères de Famille Méritants d'Artas (Isère), décide de récompenser les mères de famille « méritantes » lors d'une fête dans sa ville.
L'idée de Prosper Roche exalte les idées nationalistes de la fin XIXe et début XXe siècle, où l'on constate une forte baisse de la natalité, qui inquiète fortement les conservateurs, notamment parce que les tensions avec l'ennemi (l'Allemagne) sont toujours là et qu'on craint de se montrer moins nombreux à la prochaine guerre.
L'Allemagne, qui connaît alors cette même transition démographique due à la révolution industrielle, s'inquiète également. De chaque côté du Rhin, des programmes nationalistes tentent d'encourager les familles nombreuses.
Même Zola publie un plaidoyer en 1896, Dépopulation, qui fait l'apologie du bonheur d'un couple ayant eu 12 enfants !
Cependant, l'idée ne prend pas vraiment avant la fin de la Première Guerre Mondiale, où l'influence américaine va jouer un rôle fort dans l'établissement de la fête des Mères.
Naissance du Mother's Day
Aux Etats-Unis, la fête des mères est une journée comprenant un important budget cadeau (de 80 à 160$ par personne), dont on comprend qu'elle est souvent considérée aujourd'hui comme une fête commerciale. Une ambition pourtant aux antipodes de sa créatrice, Anna Jarvis.
La mère d'Anna avait fréquemment émis le vœu de voir la création d'un jour de fête en mai, en hommage à toutes les mères du monde.
Cette mère exemplaire avait œuvré sa vie durant pour améliorer le sort des femmes et de leurs enfants, grâce à des clubs d'entraide. Elle leur a apporté beaucoup en matière d'éducation et de salubrité, mais aussi une forme de réconciliation, alors que certaines familles étaient encore déchirées par les années de la guerre de Sécession.
A sa mort, sa fille veut réaliser son vœu et utilise ses compétences de publiciste pour lancer une grande campagne, qui aboutit à une première fête des mères en 1908. L'initiative est approuvée par le gouvernement américain, mais le Sénat refuse de reconnaître cette fête officiellement avant quelques années.
L'idée a pris bien plus vite auprès des commerçants, qui y voient une opportunité de booster leurs ventes ; notamment les fleuristes, qui décident de rattacher la fleur d'œillet à cette fête.
Mécontente, Anna Jarvis intente divers procès contre cette récupération mercantile : elle s'attaque aux fleuristes en 1922, perturbe un congrès de la confiserie de détail en 1923, critique ouvertement dans la presse l'aspect commercial de la fête, démarre un procès contre les Postes américaines (pour la réalisation d'un timbre spécial « fête des mères ») en 1934 et poursuit même Eleanor Roosevelt, l'épouse du président, pour ses œuvres caritatives dans les années 40, qui sont sous le sceau de la fleur d'œillet !
Elle meurt ruinée en 1948, hospitalisée dans un sanatorium, où elle continue pourtant de recevoir une montagne de courriers pour la remercier de son initiative désintéressée.
La fête des mères en Europe
Si la fête fonctionne dès le début des années 1910 aux Etats-Unis, elle est adoptée par les autres pays anglo-saxons du monde et par les nations d'Europe pendant la Première Guerre Mondiale.
En France, le Mother's Day a été largement répandu par les secours populaires et les soldats américains du général John Pershing, arrivés en masse à partir d'avril 1917. En mai 1918, Pershing ordonne de distribuer à tous les soldats sous son commandement (anglais, néerlandais, français ou belges) des cartes postales d'hommage à envoyer à leurs mères. Il fait même réaliser un film d'actualités par Gaumont !
Mais dès les années 20, la fête des Mères redevient l'occasion en France d'encourager les femmes à fonder des familles nombreuses pour repeupler la nation. Seules étaient visées et récompensées les mères « méritantes », ayant eu un nombre d'enfants satisfaisant.
C'est finalement Pétain qui choisit de récompenser toutes les mères de famille, même celles n'ayant eu qu'un seul enfant, en 1941. Il inscrivit la journée nationale des mères dans le calendrier. Mais le texte de loi officiel sur la fête des Mères date de 1950 : la fête a été officialisée par le président Vincent Auriol.
A travers le monde
En France, la fête est souvent perçue comme commerciale, malgré un budget moindre en comparaison des américains. Les mères peuvent recevoir des fleurs (mais rarement des œillets), un petit cadeau fait maison par les enfants ou un objet manufacturé quand ils grandissent.
Nous connaissons tous le cliché du collier de pâte fabriqué à l'école, pourtant les enseignants ont souvent de nombreuses idées pour varier du dessin ou du collier de pâtes. Et libre à chacun de rester original en grandissant pour un cadeau fait maison de qualité, comme le prouve l'image ci-dessous !
Qu'en est-il dans les autres pays ?
En Norvège, en Belgique ou en Afrique du Sud, la mère bénéficie d'un petit déjeuner au lit, servi par le conjoint et les enfants.
A noter qu'il existe une forme de résistance en Belgique face à la date : certains refusent le 2e dimanche de mai, trop attachée aux Etats-Unis et à l'aspect mercantile ; ils préfèrent souhaiter la fête des Mères lors de l'Assomption, le 15 août !
En Bolivie, la date choisie est celle du 27 mai, qui commémore la mise en esclavage des femmes ayant combattu pendant la guerre d'indépendance de la Bolivie. Le jour n'est pas chômé, mais les écoles orientent toujours leur programme autour de cette commémoration et des femmes.
En Israël, la date correspond à la mort d'Henrietta Szold, qui participa au sauvetage de 30 000 enfants juifs pendant la Seconde Guerre Mondiale, par le biais de l'organisation l'Alya des jeunes en Palestine, dans laquelle elle œuvrait.
Lors de cette journée, les parents sont invités à l'école de leurs enfants pour faire des activités.
En Indonésie, la date du 22 décembre a été choisie en hommage à un congrès de 1928, qui s'est ouvert à cette date et a rassemblé les plus grandes figures du féminisme indonésien de l'époque.
Au Mexique, le Dia de la Madre est célébré depuis 1922 et c'est l'une des plus importantes fêtes de l'année. De nombreux services publics accordent aux mères et aux enfants un jour de congé et les élèves des écoles organisent des spectacles de danses et des représentations théâtrales devant leurs mères.
Enfin, au Népal, la fête est associée à une tradition préexistante : le festival hindou Mata Tirtha Aunsi. C'est un jour dédié aux mères, à l'amour et au sacrifice.
Que leur mère soit encore en vie, ou non, leurs enfants leur exprime toute leur gratitude et prennent un bain sacré, avant une prière, suivie d'offrandes au temple ou de présents à la mère en question.
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